Le purin de porc comme emblème olfactif du Québec
Je me rappelle au début de l’été 2008 alors que je revenais d’un voyage à l’étranger et débarquais à l’aéroport Jean-Lesage. Quel choc quand les portes automatiques se sont ouvertes! Mes narines ont été assaillies par une horrible odeur de purin. Je me suis dit: «Voici comment on souhaite la bienvenue au Québec et dans sa cacapitale nationale».
J’imaginais la réaction des dignitaires pour le 400e à leur arrivée au pays du purin. Ce dossier puant me choque énormément et plutôt que de hurler ma colère dans ce billet, je vais me contenir et y aller plutôt de 10 petites questions naïves à nos employés gouvernants : le citoyen Béchard, responsable de l’Agriculture, la citoyenne Beauchamp, responsable du Développement durable, le citoyen Hamad responsable de la Eégion de la Capitale et le citoyen Lessard, responsable de la Région Chaudière-Appalaches.
En 1978, Radio-Canada dénonçait le désastre environnemental causé par la production porcine au Québec, on produisait alors 2 millions de têtes de porc par an, ce qui produisait plus de 10 fois la capacité de purin que nos sols étaient en mesure d’assimiler. On produit maintenant près de 8 millions de têtes de porc par an.
– Quelle portion du purin produit en 2010 sera assimilée sans polluer les cours d’eau et la nappe phréatique?
En 1991, 13 ans plus tard, Radio-Canada rapportait que 40% de la pollution des rivières du Québec était causée directement par l’industrie agricole et rendait plus particulièrement la production porcine responsable de la mort de plusieurs rivières dont la rivière l’Assomption.
– Comment nos gouvernements ont-ils, depuis, remédié à cette situation, et quelle est aujourd’hui la responsabilité de l’industrie agricole dans la pollution des cours d’eau québécois?
– Le gouvernement vient-il en aide aux producteurs de porc du Québec par des subventions directes ou indirectes?
– Quelle proportion des 800 millions $ payés aux agriculteurs via la Financière agricole revient aux producteurs de porc?
– Quand un industriel pollue sciemment ou par négligence un cours d’eau ou la nappe phréatique, commet-il un acte criminel?
– Pouvez-vous garantir aux citoyens qu’advenant qu’un producteur de porc puisse être tenu responsable d’avoir pollué un cours d’eau, qu’en plus d’être jugé pour son crime, que l’État le rende inadmissible à toute forme d’aide gouvernementale, tant qu’il n’aurait pas nettoyé les dégâts et corrigé la cause à la source?
Toujours selon les dossiers de Radio-Canada, les 8 millions de têtes de porc produites annuellement au Québec produisent des matières fécales qui équivalent à celles produites par 80 millions d’humains.
– Pourquoi dépensons-nous des centaines de millions $ de nos taxes pour équiper nos villes d’usines de traitement des eaux si d’autre part on déverse des milliards de tonnes de purin dans l’environnement?
Quand un canon à purin épand à la ronde, l’odeur parcours des kilomètres.
– N’est-il pas vrai que les bactéries contenues dans ces matières fécales parcourent la même distance? D’ici à ce que les correctifs soient apportés, serait-il prudent que les citoyens du Québec portent des masques chirurgicaux?
– S’il advenait que le développement subventionné par nos taxes d’une production industrielle du porc s’avère une erreur épouvantable en termes de développement durable, ne serait-il pas souhaitable de corriger l’erreur sans attendre, plutôt que de payer de nos poches année après année les déficits des producteurs?
– Si, au lieu de compenser les pertes à coup de 800 millions $ par an, on avait encouragé la construction de serres pour la production maraîchère, aurait-on fait des pas énormes vers une plus grande autonomie alimentaire tout en réduisant notre empreinte écologique et en sauvant du désastre nos cours d’eau?
Mes excuses si les données des dossiers de Radio-Canada sont erronées et au nom de mes concitoyens mal informés, je vous remercie à l’avance pour vos réponses.
François Payeur, Lévis
Source : Cyberpresse.ca